Maps to the stars : autopsie d’un inceste doré

mia-wasikowska-and-julianne-moore-maps-to-the-stars

mia-wasikowska-and-julianne-moore-maps-to-the-stars

Cronenberg revient sur grand écran avec son dernier film, en sélection officielle au festival de Cannes : Maps to the stars, un portrait glaçant de la folie humaine sur fond hollywoodien.

Cronenberg et la folie hollywoodienne

Maps to the Stars trouve son décor dans les collines d’Hollywood, là où tout est plus faux et plus fou qu’ailleurs. Julianne Moore prend tous les risques et interprète le rôle de Havana Segrand, célèbre actrice pleine de fêlures liées à l’enfance. Son thérapeute (mi coach-mi gourou) a lui-même un jeune fils sous les feux de la rampe, une sorte de Justin Bieber de teen movies, déjà en proie à la drogue et aux excès. Sa femme, dépressive, gère la carrière de leur fils d’une main de fer mais ne semble hélas pas aux commandes de sa propre existence. A tout ce déséquilibre s’ajoute celui d’Agatha, jeune fille à la peau diaphane mais aux cicatrices laissées par le feu. Cette jeune femme dont on ignore tout se laissera happer par le monde impitoyable d’Hollywood, ses vices et ses secrets.

Ceci est une adresse au lecteur qui n’aurait pas encore vu le film : vous souhaitez ne pas en savoir plus ? Arrêtez-vous ici ! Merci d’être venu. 

Cronenberg et le tabou ultime

Maps to the stars c’est avant tout l’inceste. Cronenberg prend un malin plaisir à distendre les relations malsaines qui unissent ses personnages. En transgressant ce tabou ultime, le réalisateur semble outrepasser les limites du genre qui était le sien. Le spectateur ne peut alors qu’être effaré par les proportions que prennent les histoires individuelles mais liées de chaque personnage. L’inceste c’est bien sûr l’interdit; c’est l’inavouable, la honte, la dégénérescence. David Cronenberg a de fait dressé un parallèle tout à fait intéressant entre ces histoires intimes , affreuses, et le monde instable d’Hollywood. Le réalisateur qui ne semble avoir de limites que celles qu’il se fixe, pousse l’ignominie humaine à son paroxysme. Julianne Moore, qui veut à tout prix jouer le rôle de sa mère plus jeune -c’est dire ses problèmes mentaux, jubile lorsqu’elle apprend le décès du fils de sa rivale, en lice pour le rôle. Nous ne pouvons être que mi amusés, mi médusés.

Cronenberg et la poésie

L’onde et le feu, voilà deux thèmes chers au réalisateur. Ces deux composantes essentielles, qui s’annulent, sont à la base du film, tels deux piliers fondateurs. Puis il y a ce poème d’Eluard, où chacun appelle sa Liberté; on comprendra plus tard qu’il s’agit en réalité de la leur. L’eau annule le feu, symbole de retour à la pureté, véritable libération, celle de leurs fantômes. Puisque la folie est omniprésente, la seule issue possible est…la liberté.

« Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

(…)

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté » 

Paul Eluard, Poésies et vérités, 1942

 

 

Share