Adaptée de Fassbinder, la pièce a été revisitée par Thierry de Peretti, assisté de Benjamin Charlery. La promesse d’un voyage époustouflant au coeur de la passion, celle qui ravage tout.
Une atmosphère déroutante
Le rideau est déjà levé lorsque le spectateur arrive dans la salle. Lolita Chammah est assise, lasse, sur un canapé et toise le public. Puis l’héroïne arrive, par la porte d’entrée de la salle. Les autres personnages vont et viennent par cette même entrée, créant alors une synergie avec le public, bien qu’on ne s’adresse pas directement à lui . En revanche, ce dernier a la nette impression de faire partie du décor, ce qui est déconcertant mais plaisant. La mise en scène, à la fois énergique et contemplative, propose un accompagnement musical digne du cinéma.
Une femme passionnée
Petra Von Kant est l’héroïne de cette pièce. Cette héroïne est incarnée au sens propre du terme, par Valeria Bruni Tedeschi. Elle est entière, passionnée, et se fiche bien des convenances. Totalement libre en somme ? Pas vraiment en réalité. Cette créatrice de mode qui mène sa vie comme elle l’entend succombe au charme insolent d’une jeune fille au franc parler, blasée, impulsive et belle à se damner. Karine semble perdue dans la vie et Petra représente un équilibre et un réconfort pour elle. En revanche, elle se montrera de plus en plus froide, agressive et opportuniste, plongeant la créatrice dans un profond désarroi. S’abîmant dans la passion; Petra se montrera sans défense et capable de tout. Valeria Bruni Tedeschi excelle dans ce personnage à fleur de peau, et nous laisse découvrir toute la folie qui sommeille en elle. Elle nous fait passer du rire à l’effroi, semblant s’oublie elle-même dans un personnage qu’on a pourtant décrit comme si proche d’elle…
Marlène ou la soumission incarnée
Le personnage interprété par Lolita Chammah est d’une ambivalence fantasque. Totalement dévouée à celle qui l’engage, elle ne peut masquer ses réactions et on sent chez elle toute une rébellion si bien contenue. Personnage tour à tour hilarant et inquiétant, elle surprend par ses gestes. Capable de verser du sel sur le corps de la jeune amante de sa maîtresse, mais aussi de déverser toute sa haine contre elle au piano lors de la douloureuse rupture. Elle incarne une nonchalance et à la fois une maîtrise de tous les instants qui font d’elle un personnage à la fois inquiétant et divertissant. Elle n’a aucune réplique en dehors de sa balade « à la sale pute », mais on sent toute sa présence au sein de la pièce.
Les larmes amères de Petra Von Kant, c’est définitivement une pièce à voir (vivre).
Du vendredi 6 mars au dimanche 5 avril 2015, au Théâtre de l’Oeuvre