Un brunch avec Pascal Demolon

(c) Lucie De Azevedo Felix

Un dimanche dans le 6eme arrondissement de Paris, je rejoins Pascal Demolon pour le traditionnel brunch dominical, un échange captivant qui s’est achevė la nuit tombée.

       De la vocation à la libération

« J’étais très intimidé à mes débuts, même si je ressentais la vocation de comédien comme un désir impétueux qu’il me fallait assouvir. Je rougissais et devenais très mal à l’aise quand on me regardait en face, ne serait-ce que ça. J’étais d’une timidité pathologique.

Lors de mes premiers cours, j’étais en permanence dans l’observation de ce que faisaient mes camarades. Un jour, mon prof de théâtre m’a littéralement attrapé par le col et m’a dit « Écoute Pascal, tu me demandes de prendre ton argent tous les mois, c’est le contrat, je l’applique; mais vois tu j’ai quelques difficultés avec tes réticences à monter sur scène. Ce prof à la fois génial et un peu fou avait dès lors déclenché une prise de conscience chez moi. Il m’a sorti de cette torpeur paralysante. Il m’a reveillė. »

       Du talent mais des difficultés

« Mes premiers pas en tant que comédien ont été difficiles. Ce fut très long pour moi. Les gens qui ne tiennent compte que de mes derniers projets en s’imaginant que tout a été simple sont dans une illusion totale. Je me suis quelquefois découragé au point de penser tout arrêter, à deux reprises.

Je vivais une période difficile et un ami m’appelle en s’excusant de me proposer de la figuration. Je refuse d’abord puis j’y pense toute la nuit, et le lendemain, je me ravise. Je lui précise en revanche que je ne veux pas connaitre le casting du projet, ce qu’il respecte. Arrivé sur le tournage-dans un cimetière glacial, je vois Patrick Chesnais et Alexandre Astier remonter une allée. Je reste interdit, Astier est un comédien que j’admire entre tous. J’ai honte de ce tournage en tant que figurant, je fais tout pour ne pas croiser son regard-sait-on jamais, s’il me reconnaissait, ce à quoi je ne croyais absolument pas. Le dernier jour de tournage, on finit tout de même par se rencontrer au détour d’un passage aux costumes. Je ne sais pas quoi lui dire, j’aimerais lui témoigner toute mon admiration; à la place, je murmure un vague « bonne continuation ». Il me répond la même chose, j’enchaîne sur un « ravi d’avoir pu travailler à cos côtés, en espérant que ce projet ne sera pas le seul », ce à quoi il rétorque exactement la même chose. Je me dis qu’il est en train de se foutre de moi, sous mes yeux. Il comprend ma surprise et m’explique qu’il a appelé mon agent en proposant un rôle dans Kaamelott. Je passe les détails de mon agent qui ne m’a pas fait part du message à temps et on se revoit plus tard pour tourner ensemble la série. C’est grâce à ce premier rôle de comédie que les autres ont pu suivre. »

       De Kaamelott à Radiostars

« A travers Kaamelott, les gens du métier ont pu voir que j’étais capable de jouer des comédies. J’avais joué beaucoup de drames au cinéma (Doberman aux côtés de Vincent Cassel, les films de Guillaume Nicloux, Ken Loach etc.), donc il me fallait faire mes preuves en comédie, et Kaamelott m’a donné cette chance.

Pour Radiostars, ce fut une opportunité qui m’a permis d’intégrer le casting : un comédien s’est desisté et Manu (Payet) a parlé de moi au réalisateur, Romain Lévy. D’abord réticent car il ne me connaissait pas, il m’a ensuite fait passé des essais, car tout le monde lui mettait une folle pression. Il a aimé ce qu’il a vu, et 1h plus tard il me rappelait en disant que tout le monde voulait, lui y compris. J’étais sur un projet donc j’ai du me désolidarisé, au dernier moment; dans un premier temps j’ai refusé d’abandonner le projet initial car je n’ai qu’une parole, un engagement est un engagement. Puis, on m’a convaincu de la chance que ça représentait pour ma carrière et c’est la mort dans l’âme que je me désisté de l’autre projet. »

       Un comédien de valeur, qui en compte de multiples

Puis il y a toutes les valeurs de Pascal, sa valeur refuge, l’humilité. Il sait d’où il vient, il n’a besoin de personne pour le lui rappeler, la vie l’a suffisamment fait. « Je profite de tout ce qui m’arrive mais tout en sachant que demain, ça peut s’arrêter, je sais que si c’est le ças, je serai armé pour l’affronter car je l’ai déjà vécu par le passé. Dans ce métier où tout peut paraitre superficiel ou éphémère, il faut garder en mémoire qui l’on est, vers quoi on tend, toujours. Je ne suis pas attirée par les plaisirs faciles auxquels certains de mes camarades succombent facilement. Ils s’indignent alors de l’exploitation ou du commerce des femmes, alors qu’eux en sont les premiers acteurs, de par leurs pratiques. Je ne suis pas ce genre de personne. Lucie, tu me demandais en plaisantant si dans Divin Enfant, mon rôle d’homme à la recherche de plaisir et affolé par une baby sitter de 20 ans était un rôle de composition, tu as ta réponse. Plus sérieusement, je suis aux antipodes des personnages que je peux incarner; c’est évidemment le cas avec Braquo, si tu l’avais vu, tu aurais eu peur.

Un homme comme on n’en fait plus, donc.

Pascal est actuellement à l’affiche de Divin Enfant aux côtés d’Emilie Dequenne, Sami Bouajila, Guillaume de Tonquedec et Géraldine Pailhas, ainsi que Nos héros sont morts ce soir (semaine de la critique à Cannes). Il sera également à l’affiche de Lulu femme nue aux côtés de Karin Viard.

 

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